2019 Sur le Pont hydrogène

2019 Sur le Pont hydrogène

En 2019, le thème Sur le Pont hydrogène explorait la molécule d’eau, ses spécificités et ses étrangetés, dans une tentative de fusion entre la curiosité des poètes et la rigueur scientifique.
Consultez et téléchargez le compte-rendu en ligne en suivant ce lien 

Samuel Rousseau

Rondin de bois gravé et projection vidéo

Samuel Rousseau utilise la vidéo comme un matériau parmi d’autres pour créer des installations dans lesquelles des objets ou des lieux, deviennent le théâtre d’événements en apparence anodins mais auxquels la répétition donne un caractère poétique ou parfois inquiétant.
L’installation “Onde vie” est liée à la mémoire et au temps.
Une rondelle de bois marque son âge par les cercles concentriques qui énumèrent ses années de croissance. Samuel Rousseau utilise la similitude formelle entre ces cercles et ceux que forme l’eau pour élargir l’idée de temps et introduire la notion de mémoire et de fugacité.
L’onde se déploie à partir de la rondelle de bois et l’étire sur la paroi qu’elle rend fluide et mobile. Elle épouse l’arrondi de l’arche et c’est tout l’espace qui devient fluctuant.
Chaque année peut ainsi être envisagée comme un petit caillou jeté dans un lac calme et le temps se propage comme une onde infinie.
Placée dans la crypte souterraine de l’église, cette installation prend tout son sens d’évocation de la vie, et de son opposé, la mémoire de ceux qui ne sont plus.

Marine Class

Rotin et soie peinte

Marine Class met en évidence les mouvements et ondulations de l’eau en utilisant la technique traditionnelle du papier marbré, que nous connaissons bien dans sa version très régulière pour les reliures, mais qui est aussi, sous le nom d’Ebru, une technique traditionnelle de peinture en Turquie. Elle utilise souvent cette technique pour peindre des volumes et donner à leur surface rigide la légèreté et la souplesse d’un liquide.
Pour la FEW, elle a voulu exprimer la légèreté des particules d’eau invisibles qui flottent partout autour de nous avec ce dessin dans l’espace.
Le support de l’encre est en soie fine, pour frémir avec l’air. Les structures, combinant des polyèdres assemblés, sont également aquatiques puisqu’elles sont fabriquées avec du rotin, qui implique l’eau dans sa mise en œuvre. Après trempage et imprégnation, il devient souple et malléable, et en séchant il conserve la forme qu’on lui a donnée. La sculpture fixée par un seul point pouvait tourner sur elle même et se balancer et, entre oiseau et cerf volant, évoluer gracieusement au moindre souffle.

Dominique Peysson

Installation pour trois gouttes d’eau, lentilles, vidéos

Combinant sciences et arts plastiques, Dominique Peysson a construit son projet autour des propriétés diamagnétiques de l’eau. Telle une voyante d’un temps nouveau, elle nous invitait dans son antre, un ancien atelier obscurci par des tentures noires et agrémenté de bougies et tête de mort, et nous proposait de plonger notre regard dans trois gouttes d’eau baptisées Universum, Vitæ genus et Futurae vitae. Ces gouttes sans cesse renouvelées deviennaient des boules de cristal, dans lesquelles nous pouvions découvrir le passé, le présent et l’avenir.
Le diamagnétisme est un comportement des matériaux qui les conduit, lorsqu’ils sont soumis à un champ magnétique, à créer une très faible aimantation opposée au champ extérieur. Autour de cette propriété prouvée scientifiquement, se sont développées de nombreuses hypothèses sur le caractère bienfaisant d’une eau magnétisée, et par extension, la notion de mémoire de l’eau. L’artiste joue ici avec ces différentes pistes qu’on peut nommer croyances ou supports d’imaginaire, et qui sont surtout des signes, s’il en est besoin, que notre rapport à la vie reste complexe et son développement mystérieux même si les connaissances physiques augmentent.
Photographies Dominique Peysson

Patrice Pantin

Peinture sur papier

Patrice Pantin explore la peinture par le travail de sa surface et de sa matière. Il incise, brûle, arrache, et ces actions aux connotations violentes donnent naissance à des œuvres délicates et subtiles, en dialogue avec la lumière.
Son projet pour Wattwiller s’appuie sur une carte des réseaux hydrographiques souterrains du Massif du Molkenrain et de Wattwiller qui analyse la géologie et la vulnérabilité du sol aux pollutions par infiltration. C’est la faculté de la molécule d’eau à se lier avec les substances qu’elle rencontre qui est mise en évidence, sa fragilité invisible, souterraine. Comme l’eau, la peinture est changeante et mobile, elle se transforme selon la lumière et le point de vue. Ce ne sont pas des effets de couleur qui expriment la lumière, c’est la matière même de la peinture qui est travaillée, découpée dans des sens différents selon les surfaces, pour révéler le blanc du papier ou la couleur. La peinture est un bas relief d’une finesse extrême dont les volumes imperceptibles transforment l’image et créent plusieurs paysages sous les yeux du spectateur qui, dans ce dispositif installé dans la gloriette du presbytère, peut tourner autour.

Julien Laforge

Bois peint et métal

Julien Laforge s’intéresse à la légende Dogon de création de l’eau, rapportée par Marcel Griaule, qui décrit la création des jumeaux Nommo, couple hermaphrodite et dieux de l’eau dans la pensée Dogon.
“Dieu les a créés comme de l’eau. Ils étaient de couleur verte, en forme de personne et de serpent. De la tête aux reins ils étaient humains ; le bas était serpent. Les yeux rouges étaient fendus comme ceux des reptiles. Les bras, souples, n’avaient pas d’articulations. Tout leur corps était vert, lisse et glissant comme une surface d’eau, garni de poils courts et verts, annonce des végétations et des germinations.”
Julien Laforge utilise le bois, taillé, assemblé, et peint. Il met en opposition des volumes massifs et des éléments déliés et graphiques, à la limite de la résistance du matériau. Par l’imbrication de différentes formes, il a réalisé cette sculpture sensuelle évoquant ces personnages mythiques qui ont inventé la parole pour tresser un vêtement à leur mère nue. Installée dans un jardin privé qui fait face à la plaine du Rhin, elle a permis à ses habitants d’expérimenter la sensation d’avoir une œuvre dans leur jardin.

Sandrine Stahl

Vidéo sonore 2’51 et parfum diffusé

À côté de la création à quatre mains avec Delphine Gutron, Sandrine Stahl présentait une vidéo réalisée en 2015.
L’artiste est curieuse de différents media et la caméra lui permet ici de révéler et transformer le réel pour perturber notre perception.
Entre protozoaire divaguant et encre en dilution, cette forme indéfinie nous entraînait dans un monde aquatique en suspension dans le temps et l’espace.
Le son, entre abysses et clapotis, et une légère diffusion d’odeur marine complétaient ce voyage sensoriel qui nimbait le spectateur dans sa fraîcheur. Ancien alambic, four à pain, les objets maintenant inutilisés qui meublaient ce petit espace clos étaient remis en lumière par cette fenêtre ouverte dans la paroi.
https://www.youtube.com/watch?v=gYLQsSb639g

Valérie Graftieaux

3 photographies tirages sur aluminium 110 x 170 cm

Valérie Graftieaux explore différents supports, principalement la photographie, mais également la gravure, la peinture ou le dessin. Elle travaille par séries, ce qui lui permet de révéler les variations infimes qui sont l’essence de ses projets. Le rapport à l’eau est souvent présent sous forme de traces ou de sédimentation.
Dans Chuchotements, elle observe les traces laissées par des gouttes d’eau chargées d’encre dans un godet utiisé par l’artiste depuis plusieurs années. En séchant, la forme des gouttes change, l’encre s’accumule sur les contours et l’ensemble crée un graphisme délicat. L’installation de ces trois grands tirages en doublure des parois d’une grotte leur donne un sens presque sacré, tant l’eau est attachée à de nombreux miracles dans toutes les mythologies et religions. Les larmes de la Vierge sont très présentes dans le culte marial, et ces larmes d’encre peuvent évoquer la trace de douleurs inexprimées, de mots vidés de leur sens, de l’évaporation des suppliques chuchotées.
D’un point de vue plus physique, ces images mettent en évidence la tension de surface des gouttes, qui repousse l’encre le plus loin possible du centre en séchant. Le cœur préserve ainsi sa transparence.

Gutron et Stahl

6 Monotypes imprimés sur plexiglass

Les deux artistes ont développé ces derniers temps un travail à quatre mains de dessins ou de plaques pour monotypes.
Pour leur projet “Mémoire de larmes”, elles se sont inspirées de photographies de vues de larmes au microscope électronique.
Elles ont en effet découvert que les larmes ont des combinaisons d’eau salée et substance organiques différentes pour chacun de nous et selon la cause qui les déclenche. Il existe trois grands types de larmes : basales, réflexes et psychiques (déclenchées par des émotions).
De là à en déduire que les larmes sont porteuses de la mémoire de nos émotions, certains diront que c’est une hérésie scientifique, et d’autres que c’est une matière à rêver.
Se situant plutôt dans la seconde catégorie, les artistes ont utilisé l’étonnante diversité des larmes pour réaliser des dessins qui expriment des sentiments différents, joie, tristesse, rire, amour, et larme “basique” qui coule par réaction aux éblouissements ou aux oignons..
Imprimées sur des lamelles de microscope à grande échelle, les traces de larmes se mélangent aux eaux du ciel et ce sont peut-être les émotions du paysage qu’elles révèlent ici.

Office Masaru Emoto

10 photographies imprimées sur tissu

Masaru Emoto est un universitaire japonais qui a défendu la thèse que la conscience humaine et surtout les mots et la voix, peuvent avoir une influence sur la structure de l’eau. Les notions de résonance de l’énergie et de vibrations positives sont au cœur des séries de photos qu’il a entreprises et qui montrent les différents aspects d’un cristal d’eau soumis à des sonorités diverses. Si ses théories sont controversées par les scientifiques, il se considérait plutôt comme un humaniste et un fervent défenseur du caractère précieux de l’eau, et de la responsabilité humaine envers la nature. Son équipe continue le travail de prises de vue et de diffusion de ses idées.
Un échantillon d’eau des sources de Wattwiller a été envoyé au Japon, et des cristaux ont été photographiés au microscope électronique.
Ces images, accompagnées de cristaux d’autres lieux de la planète, formaient un «pont» entre art et sciences et débutaient le parcours.
Quelles que soient les convictions de chacun, il semble assez évident que des vibrations positives émises par des personnes bienveillantes ont plutôt un effet bénéfique sur leur entourage. Et si l’eau, avec son cycle infini, pouvait les véhiculer, ces bienfaits pourraient s’étendre comme la rosée matinale…

Projets pédagogiques

Valérie Graftieaux et l'école élémentaire de Wattwiller

classe de CP/CE1 de Dominique Ackermann 
Dessin, peinture, photographies et vidéo image par image

Le projet s’appuie sur différentes expériences aux allures de protocole scientifique qui mettent en présence trois variables, la papier, l’eau et l’encre, et les modifient avec différents “réactifs”, huile, cire, savon, gomme arabique,… Les enfants ont fait les préparations sur différents papiers puis, avec rigueur, expérimenté les réactifs et fait intervenir différentes eaux chargées en sel, sucre,.. et sélectionné ce qui les intéressait. Ils ont ensuite photographié en macro-photographie. Ils ont ensuite repris certaines expériences en direct pour faire des petites vidéos en time-lapse, et inventé de nouveaux essais avec de l’eau chaude, de la vapeur, et des matières plastiques diverses.
La notion d’espace et de planètes a été introduite pour évoquer les perceptions de l’infiniment grand et de l’infiniment petit. Un travail d’observation et d’attention pour apprendre à pousser une idée au plus loin dans le temps et l’exigence. Et au final, un magnifique abribus avec l’assemblage des photos, et une vidéo en lien ci-dessus

Kristine Groutsch avec le CSC AGORA

Performance et dessins

Depuis une dizaine d’année, l’Agora et la FEW collaborent autour de projets culturels destinés au public de l’Agora. Ces projets sensibilisent les habitants du quartier Bel-Air à la culture et les incitent à venir sur le parcours de la FEW et créent de la mixité sociale. Ils s’appuient sur quelques heures de formation des animateurs.
Le projet 2019 s’intéressait au corps dans l’espace et aux relations entre mouvements et arts plastiques. Proposant une passerelle vers les sciences, la danse aborde l’univers des molécules d’eau grâce à des jeux d’associations entre les danseurs : se relier, se détacher, être proches, être en relation tout en se tenant à distance,… Comment écrire dans l’espace des notions de fusion, ébullition, attraction, fluidité, contraction, agitation ? Un condensé des expérimentations a été présenté en public pendant la journée d’inauguration de la FEW.
Des dessins ont été réalisés en référence au travail corporel et imprimés pour servir de cadre à la représentation et témoigner du projet pendant la durée de l’exposition. Le plus gros du travail a été fait pendant les vacances de Printemps, avec des répétitions échelonnées ensuite. Un groupe de mamans lui a été associé et assurait les rythmes.

Samuel Rousseau avec l’école du Blosen de Thann

Classe de CM1 d’Anne-Catherine Valentin 
4 vidéos projetées sur des constructions en matériaux divers

Un nuage du tonnerre
Miss Thann
Fleurette
Système solaire

Ce projet a été possible grâce à une résidence en milieu scolaire soutenue par la DRAC et la DAC du Rectorat. Samuel Rousseau a passé trois semaines dans l’école du Blosen et partagé son travail avec tous les enfants. Un temps plus long a été consacré à la classe de CM1 pour faire cette création spécifique. Le résultat de leurs ateliers a été présenté dans l’école, aux parents et élèves, le vendredi 26 avril.
Dans l’optique de créer des microcosmes aquatiques singuliers, l’artiste a proposé des expériences avec l’eau et différents réactifs. Chaque groupe d’élèves en a tiré une vidéo pour laquelle il a inventé un support de projection, emblème d’un monde que ces visuels lui ont permis d’imaginer.

Ouïssem Moalla et le Collège de Saint-Amarin​

Les élèves de Régine Fimbel du Collège Robert-Schuman de Saint-Amarin
Installation bois et sel

Ouissem Moalla s’intéresse à la philosophie et notamment à Platon dont la réflexion sur les formes nourrit son travail. Il imprègne également son imaginaire des mythes antiques. Dans la tradition orphique, Chronos, auquel le titre fait référence et qui représente le temps, est considéré comme le fils de Gaïa, la terre et Hydros, les eaux primordiales.
Il a proposé aux élèves la mise en relation et en réaction de trois éléments, le bois, l’eau et le sel. Le bois et l’eau créent de la moisissure, le sel intervient en bloquant l’évolution de cette moisissure et en se cristallisant à la surface du bois.
Les traces apparentes sur les morceaux de bois sont les marques du passage du temps, et de l’intervention des élèves, la révélation des relations complexes entre le vivant et le minéral. Elles peuvent être lues comme différentes allégories philosophiques, la vie, et son déroulement jusqu’à la mort, les strates de la mémoire et de l’oubli ou une réflexion sur le beau.

Marina Krüger et résidents du Foyer Les Tulipiers

Installation, bois, peinture et cordages

Marina Krüger est Chargée d’Ateliers Artistiques et de Projets Culturels à la Résidence Les Tulipiers de Wittenheim, qui accueille des personnes adultes souffrant de troubles psychiques. En s’appuyant sur des références artistiques et techniques, elle a proposé à un groupe de réfléchir à une installation exprimant leur idée du pont. L’étude des différents moyens inventés pour traverser les cours d’eau, comme les ponts de singe, a permis d’aborder les notions de passage, de relation, d’embûches, d’équilibre ou de danger, et également de rencontre et d’échange.
Quatre “ponts” ont été réalisés en atelier en fonction du lieu choisi en amont par le groupe : Le Pont Voisins bâti de maisonnettes, Le Pont Coupé en référence à l’expression «couper les ponts», Le pont Balançoire aux couleurs d’arc-en-ciel en référence à la mythologie nordique, Le pont piège au tablier parsemé de trous.
Un carnet de bord également exposé, rassemblait les approches graphiques préalables et les étapes proposées par l’animatrice pour faire évoluer l’imaginaire.

Projet Lutetium

6 vidéos de 2’ environ
Des gouttes qui nagent – Des gouttes qui rebondissent – Des gouttes qui s’éclatent – La transition vers la turbulence – Les marcheurs, gouttes et ondes – Impact

Trois étudiants de l’ESCPI Paris, Guillaume Durey, Quentin Magdelaine et Mathias Casiulis, ont utilisé la synergie entre plusieurs grandes écoles parisiennes pour réfléchir à la vulgarisation de leur domaine de recherche, la physique des liquides et de la matière molle.
“Les expériences en musique” ont été créées pour expliquer certains comportements des gouttes qui nagent, rebondissent ou s’éclatent… Elles sont accompagnées de compositions musicales originales.
Aux antipodes de la pensée de Masaru Emoto, elles étaient également présentées à l’accueil du parcours et posaient la question des relations entre l’art et la ou les sciences.
Le projet a été soutenu par PSL (Paris Sciences et Lettres Research University), groupement de grandes écoles et d’instituts de recherche qui mutualisent leurs moyens et leurs ressources au bénéfice des étudiants.

Événements